vendredi 1 février 2013

Jeunes et police, un débat sans fin ?

Sihame Assebague, porte-parole du collectif Stop le Contrôle au Faciès, Fabien Jobard directeur du Centre de recherche Sociologique sur le droit et les institutions pénales, et Hélène Vincent, adjointe à la jeunesse de la mairie de Grenoble ont débattu aujourd’hui sur les rapports entre les jeunes et la police.


Hélène Vincent, Fabien Jobard, Alice Géraud et Sihame Assebague.

"Aujourd’hui, la question des rapports entre la jeunesse et la police est une question taboue, traitée de façon autoritaire et sécuritaire, et non démocratique" déclare Alice Géraud, journaliste à Libération et modératrice du débat. Les adultes, démissionnaires, seraient absents de l’espace public, les jeunes n’auraient donc plus de cadres, ni de contraintes. Peu à peu, la police se substituerait à ce cadre, et deviendrait le seul interlocuteur des jeunes, incarnant ainsi l’autorité contre laquelle se cristalliserait la colère de cette jeunesse qui ne se sent pas écoutée.

Dans les années 1990, une police de proximité inspirée de l’expérience américaine est mise en place comme alternative à la police judiciaire et punitive. Cette politique de dialogue est arrêtée dès les années 2000 par Nicolas Sarkozy, sous la pression des syndicats de police. Mais pour le collectif Stop le Contrôle au Faciès, ces relations étaient déjà les mêmes il y a 30 ans, on se souvient de la Marche des Beurs en 1983. La disparition de la police de proximité au profit d’une police « conflictuelle » n’a donc pas changé ces relations déjà tendues. Par ailleurs, depuis 1994 la révision du code pénal permet de poursuivre pénalement les mineurs. Le nombre d’interventions de la police et d’interpellations est donc gonflé, tout comme la quantité de délits. En conséquence, les conflits violents entre les jeunes et la police sont également multipliés.

Contrôle d’identité et palpation
Symptôme de ces relations conflictuelles, le contrôle d’identité occupe une place centrale dans ce débat. Ces contrôles réguliers qui, d’après l’étude de Fabien Jobard, visent particulièrement les hommes, jeunes, de couleur, habillé d’une certaine façon et portant un sac à dos, sont vécus comme des humiliations. Tout comme les palpations en pleine rue. Pour lutter contre ces discriminations, le collectif de Sihame Assebague souhaite mettre en place un récépissé de contrôle qui en cas de violation des droits permettrait de saisir le Défenseur des Droits.

« Remettre justice et égalité là où il n’y en plus ».
Aujourd’hui, 5% seulement de ces contrôles mènent à interpellations, le reste des contrôles ne sert à rien. Elus, sociologues et associatifs, tous s’accordent, il est nécessaire de rétablir le dialogue et le respect entre les jeunes, qui ont leur part de responsabilité, et la police. Pourtant, le récépissé a été abandonné par Manuel Valls, pour des raisons politiques, et sous la pression des tout puissants syndicats de police. Par ailleurs, en cas de bavure de la police, qu'il s'agisse de contrôles répétés ou de violences faites aux jeunes lors de manifestations et d’interpellations, les responsables ne sont que très rarement condamnés. Pour le sociologue fabien Jobard, la Justice qui est publique ne peut s’exprimer à l’encontre de la police. Mais c’est là un autre débat.

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